jeudi 1 novembre 2007

Manu Chao, el espectáculo

Quelques mots et des photos pour raconter Manu Chao à Liège... Est-ce que ce sera suffisant ? Il ne s'agissait pas seulement d'un concert, mais d'une expérience, d'une tranche de vie.

J'ai eu le privilège d'entrer dans un monde tellement différent de celui habituel des concerts.

C'était le 23 octobre, il faisait froid. Enfin je crois...Laforge : Pourquoi faire un concert à Herstal, près de Liège ?

Manu Chao : Parce qu'à une époque où personne ne voulait de moi, même à Paris personne ne me trouvait de concerts à faire, ici à Liège on me permettait de jouer et ça, ça ne s'oublie pas !

Ce concert de Herstal a été organisé en 3 jours. Manu Chao avait décidé de venir ici pour remercier et aider les caravanes de quartiers.
Ses musiciens ont suivi.
Le concert devait se faire à La Fabrik, un ancien site industriel chargé d'histoire. C'est devant cette usine que des ouvriers avaient été fusillés par des soldats allemands pendant la dernière guerre, pour avoir refusé d'aller travailler en Allemagne.

Quelques jours avant le concert, il s'est trouvé que les places vendues à 16,5 € étaient proposées sur des sites d'enchères à plusieurs centaines d'euros. Pour casser le marché noir, il a donc été décidé à "l'arrache" de faire le concert dans la cour de l'usine désafectée. On peut y mettre plus de monde et donc remettre en vente des billets au prix normal.
Fuck le marché noir.

En arrivant dans la cour en question, 3 heures avant le concert, il fait déjà nuit et froid. Vodka, parka et tout le tralala.

L'ambiance est surréaliste par rapport à tout ce que j'ai vécu en concert jusqu'à présent. Les organisateurs, débordés de boulot ne se prennent pas la tête, on ne nous demande pas non plus notre pass tous les quatre mètres ou à chaque fois qu'on veut aller pisser !

D'ailleurs, quel pass ? Je n'en ai même pas. On me raconte même que la veille, les organisateurs et les potes de Manu bossaient encore à arracher des arbres qui avaient poussés dans ce vague terrain de concert !

On se serait cru juste avant le concert d'un groupe de quartier. Mais le quartier de Manu, c'est le monde maintenant. Des dizaines de millions d'albums vendus et toujours le même esprit de partage que lorsqu'il n'avait pas une thune et jouait dans un garage de la banlieue de Paname.

Qui dit concert, dit aussi merchandising et bar.
Alors voici le bar, j'étais le premier client !
Malgré le petit degré qu'affiche le thermomètre, l'ambiance est effervescente, mais saine aussi et maitrisée. Devant le bar, c'est chaud comme la braise où ça s'active avec ...

mais ... mais c'est quoi ces drôles de plantes ?
Déconnez pas les mecs !
Vous faites quoi ?
Ah d'accord ! Des feuilles de menthe, pour faire des mojitos.
Pardon, pardon, j'ai eu une hallucination !
A la bonne franquette.

Je parlais de merchandising, évidemment il n'est pas question d'acheter ici des casquettes Manu Chao à 30 € pièce ou des T-Shirts à 60 €. L'esprit est plutôt à l'équitable avec des produits comme du café méxicain que des mecs vendent en bravant le froid. Des commerçants zapatistes.
Ils vendent aussi des T-Shirts avec l'étoile rouge sur fond noir, symbole de l'armée zapatiste de libération nationale, un groupe révolutionnaire basé au Chiapas (Mexique).
Pendant un instant, j'avais l'impression de revivre certaines sensations connues dans des quartiers de La Havanne, tôt le matin.

Puis on m'a amené dans le bus garé lui aussi dans la cour. Décidément, tout se passe ici, elle foisonne de vie cette cour. Au fond du bus, Manu Chao qui m'attend en souriant. Ca part bien. Le temps de me mettre à l'aise, de brancher le nagra et de m'asseoir. Je lui ai proposé de discuter plutôt que de faire une interview.

Ok !

Alors on a discuté notamment des bootlegs, ces morceaux de musique piratés pendant ses concerts et qui se trouvent le lendemain sur internet. Ca n'est pas un problème pour lui, c'est internet, c'est l'évolution. Il me dit même ..." Que si un mec utilise ça pour faire de l'argent sans son autorisation ça peut être génant. Et encore faut voir, si c'est pour une bonne oeuvre c'est bien."

Pour le bousculer un peu, je lui réponds que ça représente certainement un manque à gagner pour lui. Il me regarde alors avec un peu de tristesse dans les yeux et m'explique ..."...Si je commence à penser comme ça, ce n'est pas la peine. Je gagne suffisamment ma vie pour ne pas me demander comment je pourrais faire pour gagner encore plus."

Vingt minutes plus tard, on a coupé le micro, il m'a laissé le temps de finir mon thé chaud, j'avais encore une ou deux questions mais je savais qu'il devait faire ses balances. "C'est bon me dit-il, on a bien encore cinq minutes !"

Pendant ces cinq dernières minutes qui ont duré facilement 600 secondes, on s'est dit des choses intéressantes et surtout, surtout...on a pris un rendez-vous pour ce qui sera j'espère un truc bien sympa. Mais comme dans ce "contract" verbal que j'ai signé avec lui, j'ai promis de ne rien dire alors... je ne dis rien !

Le concert a commencé.
En le regardant du bas de la scène, je repensais à ce qu'il m'avait dit, à cette promesse, à ce projet. Je pensais aussi à ces concerts qu'il fait à l'arrache dans des bars en Amérique du Sud avec ses musiciens.

Des concerts totalement improvisés. Au bout de quelques minutes, certains clients le reconnaissent et envoient des SMS pour prévenir des potes. "A partir de là, me dit Manu Chao, on sait qu'il nous reste environ une demi heure avant qu'il n'y ait trop de monde. Lorsque le bar est plein, on s'en va vers un autre bar."
Madjid le guitariste fou.


En montant sur scéne, Manu Chao et les musiciens font des échauffements pendant quelques minutes en sautillant sur le côté de la batterie ...

Puis c'est l'explosion.

Des rhytmes à la Manu Chao teintés fortement de rock, de reggae et de ska. Je lui avais demandé s'il avait eu une idole. Il m'avait répondu qu'il n'avait pas d'idole mais des profs de musique. "Par exemple Bob Marley n'est pas mon modèle, mais mon prof, il m'a tout appris."
Hace frío senor ! (On se les gèle !)

Pas facile par quasi zéro degré d'appuyer sur le déclencheur de l'appareil photo. Le pauvre objectif commence à ne plus vouloir tourner. Trois heures au froid, c'en est trop pour lui.

Me gusta el sol.
Me gusta la calor.
Me gusta la musica.
Me gusta este hombre.

Il y aurait dû avoir 1500 personnes dans l'usine, finalement plus de 3000, peut être même 4000 personnes se sont tassées les unes près des autres. C'est amusant, lorsque l'esprit est à la fête et à la tolérance, du coup tout le monde est gagné par l'ambiance.
Je me suis surpris à ne pas pester contre ces spectateurs qui fendent habituellement la foule avec six ou huit bières qu'ils rapportent du bar en les tenant à bout de bras au dessus des têtes. Avec dans la bousculade, des éclaboussures pour tout le monde.

D'habitude j'ai tendance à leur dire : Putain, vous faites chier. Vous pouvez pas boire votre picole au bar et revenir après ! Regarde moi ça, mon blouson est ruiné !

Ce soir je suis du genre ... Mais je t'en prie mec, passe par ici je te fais une place. Fais quand même gaffe à mon blouson s'il te plaît... Pas facile de prendre le regard en photo avec cette casquette qui fait de l'ombre.


Y ahora, que voy a hacer,
Y que horas son, mi corazón.
Once de la tarde ?

Il est 23 heures ? Déjà ! Vamos a dormir todos !

J'ai entendu "Merci Liège, merci les caravanes de quartiers..." D'autres phrases m'ont échappées.
Hasta Siempré !

Manu Chao et ses musiciens étaient venus partager de la musique, ils ont donné plus que ça, bien plus.
Mais ça ils ne peuvent même pas s'en rendre compte, c'est dans leur nature.

Le concert s'est terminé, c'était il y a déjà plusieurs jours, au moment où j'écris ces lignes, les lumières ne se sont toujours pas éteintes.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Comme d'habitude de belles photos. Bonne idée de nous faire partager aussi les coulisses. Vivement le prochain concert de Manu Chao.

Anonyme a dit…

On ne peut pas en savoir un peu plus sur ce projet ??